>> Plus qu'une chanson,
c'est un symbole. Chantée par les "mutins" lors des
événements d'avril-juin 1917, interdite par le commandement, devenue
ensuite l'un des grands hymnes du pacifisme, la chanson de Craonne reste
pourtant un mystère. Par qui a-t-elle été composée ? Quand ? A
quelle occasion ? L'air est celui de "Bonsoir m'amour", une
chanson populaire réaliste d'avant-guerre. Les paroles ont été
retranscrites et publiées par Paul Vaillant-Couturier, auquel on prête
souvent, à tort, leur rédaction. Voilà tout ce que l'on en sait avec
certitude... Pour le reste...
>> Il semblerait qu'à
l'origine, cette chanson n'ait pas été celle de Craonne, mais celle de
Lorette, autre plateau célèbre pour ses combats sanglants, en 1915.
Seul son succès lui a permis de passer à la postérité. Les chansons
de ce type, reprenant un air connu avec des paroles détournées pour la
circonstance, furent en effet légion pendant la Grande Guerre. Très
peu lui ont survécu.
>> Voici donc le texte
quasi-mythique de ce chant de lassitude plus que de révolte, tel qu'il
fut noté par Paul Vaillant-Couturier...
>> Source : site web http://www.grande-guerre.org
Année 191? ( ??? / ??? )
Quand au bout d'huit jours, Le repos terminé, Nous allons reprendre les
tranchées, Notre vie est utile Car sans nous on prend la pile. Oui mais
maintenant On est fatigué. Les hommes ne peuvent plus marcher. Et le cœur
bien gros Avec des sanglots On dit adieu aux civlots, Même sans
tambour, Même sans trompette On s'en va là-haut en baissant la tête.
Adieu la vie, adieu l'amour, Adieu toutes les femmes, C'est pas fini,
c'est pour toujours, De cette guerre infâme. C'est à Craonne, sur le
plateau, Qu'on doit laisser not'peau. Car nous sommes tous condamnés,
C'est nous les sacrifiés...
Huit jours de tranchées, Huit jours de souffrances, Pourtant on a
l'espérance. C'est enfin la relève Que nous attendons sans trêve.
Quand avec la nuit Dans le profond silence, On voit quelqu'un qui
s'avance : C'est un officier de chasseurs à pied Qui vient pour nous
remplacer... Doucement dans l'ombre, Sous la pluie qui tombe, Nos petits
chasseurs viennent chercher leur tombe.
Adieu la vie, adieu l'amour, Adieu toutes les femmes, C'est pas fini,
c'est pour toujours, De cette guerre infâme. C'est à Craonne, sur le
plateau, Qu'on doit laisser not'peau. Car nous sommes tous condamnés,
C'est nous les sacrifiés...
C'est malheureux d'voir Sur les grands boulevards Tant d'cocus qui
font la foire. Si pour eux la vie est rose Pour nous c'est pas la même
chose. Au lieu de s'promnener, Tous ces embusqués F'raient mieux de
venir dans la tranchée. Tous nos camarades sont étendus là, Pour
sauver les biens de ces messieurs-là.
Adieu la vie, adieu l'amour, Adieu toutes les femmes, C'est pas fini,
c'est pour toujours, De cette guerre infâme. C'est à vot' tour,
messieurs les gros, De monter su'l'plateau. Si vous voulez faire la
guerre, Payez-la de vot'peau.
Copyright © : |